Le combat d’une association pour les lévriers martyrs
Soumis par Rédaction Corrèze le lun, 08/01/2018 – 11:43
Cause animale
L’association Aide aux Lévriers Martyrs mène depuis 2015 un combat pour le sauvetage de chiens victimes des us et coutumes dans certains pays, que ce soit au plan économique comme en Irlande, rentables chiens de course (greyhound) ou celui de la tradition cynégétique en Espagne, corvéables chiens de chasse (galgo). Si l’expression antropomorphe «mener une vie de chien» changeait de sujet, on pourrait l’accoler au sort des lévriers… En effet, qu’il soit greyhound, podenco ou galgo, qu’ils vivent en Espagne, en Irlande, au Royaume-Uni, en Australie, aux États-Unis, en Nouvelle-Zélande, en Argentine, en Asie ou à Macao jusqu’à peu, le lévrier, originaire d’Afrique, est né souvent sous une mauvaise étoile.
Au Royaume-Uni, le lévrier greyhound est la matière première qui alimente l’industrie sans fin des courses. Et contrairement aux chevaux, leur sort n’est pas enviable au regard des milliards d’euros que rapportent les paris.
Chiens bichonnés des cours royales au Moyen-Age qui ornent nombre de tableaux et de tapisseries, chiens vénérés de l’Egypte antique, le lévrier a
perdu un peu de sa superbe. Prenons le cas méconnu du greyhound. Dans les pays anglo-saxon, le greyhound n’est pas considéré comme un chien de compagnie, aucun décret, aucune loi ne le protège. «C’est un chien de rente, une machine à courir, un outil de travail qui a le même statut que les animaux de ferme, c’est un animal de rapport comme le bétail», rappelle l’association Aide aux Lévriers Martyrs. Son ou ses propriétaires ont droit de vie et de mort sur ces chiens. «Notre but est de sauver dans un premier temps les lévriers galgo ou greyhound d’Irlande. L’Irlande est le premier naisseur de lévriers au monde. C’est une industrie dans ce pays liée à son économie. Chose à laquelle il est très difficile de s’attaquer à l’heure actuelle. Le marché est celui des courses et ensuite la revente des chiens à la retraite» précise Katia Laballe, vice-présidente de l’association ALM, habitante en Corrèze. En partenariat avec l’association anglaise Greyhounds In Need (GIN) pour les galgos, et l’IRGT Irlandais pour les greyhounds, l’ALM prend en charge quelques-uns de ces chiens en vue de leur adoption.
Une seconde vie pour ces animaux qui souvent, au bout de deux ans, sont soit euthanasiés, vendus à des labos ou encore en Chine comme viande à consommer…
Difficile d’imaginer l’envers du décor pour un touriste lambda qui visite l’Irlande et sur les conseils de son tour operator passe une soirée dans un cynodrome ou bien greyhound stadium. Le spectacle offert sur lequel il faut parier, est celui des six chiens surexcités courant entre 280 et 700 mètres à plus de 50 km/h sur une piste de sable après un lapin mécanique. Les courses de lévriers telles qu’elles sont aujourd’hui sont nées aux USA en 1912. Elles existent aux USA, au Royaume-Uni, en Irlande, en Nouvelle-Zélande, en Australie.
Sur son site, ALM a mis en ligne un texte intitulé «la prière du greyhound» : «On a eu beaucoup de réactions de personnes qui pensent que ces chiens sont contents de courir. Ce sont des performeurs, surentraînés, parfois dopés malgré l’interdiction. La vie d’un greyhound c’est vivre dans une grande cage dans des hangars entiers, élevés et conditionnés. Ils vivent 20h sur 24 en cage, sont nettoyés au karsher. Il n’y a aucune empathie, ce sont des bêtes de rapport» insiste Katia Laballe.
L’ALM est la seule association en France à faire adopter des retraités de courses d’Irlande. Elle a permis l’adoption d’une quinzaine de chiens greyhound en deux ans.
Le déshonneur des galgos
En Espagne et surtout dans la région de l’Andalousie, le lévrier galgo est utilisé dans la pratique de la chasse sans fusil. Elle est autorisée et pratiquée alors qu’elle est interdite en France depuis le 3 mai 1844. Ces chiens possèdent une vue à 360° qui leur permet d’attraper les petits gibiers sans trop de difficultés. Chaque année sont organisés des concours de chasse au lièvre (carreras el campos). Si le vainqueur a droit aux honneurs, les perdants eux, subissent le déshonneur de la part de leurs maîtres. «Ils sont très maltraités, surtout à la fin de la période de la chasse. Les mauvais chasseurs sont pendus selon la méthode du piano, brûlés vifs. On leur déverse de l’acide etc… pour laver l’honneur du chasseur parce qu’il a mal servi son maître» dénonce Katia Laballe de cette barbarie «culturelle». Les nouvelles générations de chasseurs semblent moins enclines à cette cruauté gratuite.
Quelques milliers de galgos seraient tués chaque année. Pour arrêter ce massacre, l’ALM rappelle qu’il faudrait juste que l’Espagne respecte le Décret Européen n° 2004-416 du 11 mai 2004 portant publication de la Convention Européenne pour la Protection des Animaux de Compagnie. Depuis l’introduction de l’Article 13 du Traité de Lisbonne, tous les animaux sont considérés comme des êtres sensibles.
Contrairement à l’Irlande, il existe de nombreux refuges pour les galgos (et podenco) en Espagne. Les fourrières (perreras) peu reluisantes, sont un terreau favorable à la corruption et au trafic.
«Avoir un lévrier une fois dans sa vie, c’est en avoir toute sa vie» (Katia Laballe)
En lien avec l’association GIN, ALM récupère des galgos et les reçoit dans une résidence en France. Ils sont ensuite pucés, vaccinés, contrôlés sur la maladie de la leishmaniose. L’association a aménagé spécialement un camion pour ses transports avec des bénévoles formés. Elle a privilégié les adoptions en petit nombre dans les meilleurs conditions. Elle vient de prendre en charge 5 galgos en novembre dernier. Les chiens sont parfois placés dans des familles d’accueil avant leur adoption. «Avoir un lévrier une fois dans sa vie, c’est en avoir toute sa vie. C’est un chien infiniment proche, très fin de corps et d’esprit» sourit Katia Laballe.
Sur le site d’ALM, les photos de Tara, Jezki, Careta en sont la preuve vivante.
Infos + Site www.levriers-martyrs.com ;
Association : 07.88.68.90.24.
L’adoption coûte 350 euros. ALM compte 230 adhérents. Un roman (Les âmes assassinées) de Patrice Sopel (Ed Encres rouges) a pour thème les galgos. L’auteur s’est engagé à reverser une partie des droits.
Serge Hulpusch